Depuis quelques décennies, toutes les institutions religieuses, surtout en Occident, s’interrogent sur l’absence des jeunes dans leurs activités. Plusieurs hypothèses sont avancées parmi lesquelles deux sont plus évoquées. La première hypothèse soutient que les jeunes d’aujourd’hui sont moins religieux et la deuxième postule qu’ils sont moins attirés par la manière dont les célébrations sont organisées. Ce qui est vraie c’est qu’il y a une ligne droite entre les deux. S’il semble que les jeunes sont moins intéressés à la religion, ce n’est peut-être pas parce qu’ils sont moins religieux mais parce qu’ils se sentent étrangers dans les milieux religieux. Et la raison de leur indignation n’est pas seulement liée à nos célébrations mais tient peut-être plus au modèle de leadership de nos institutions. Raison pour laquelle nous voudrions examiner l’origine de ce fléau.
La société nous a toujours fait croire, à tort, que pour être un bon leader, il faut être fort. Cette idéologie a fait naître des monstres au nom de leaders. Et comme le pouvoir, vu dans cette optique, n’est jamais assez, ces leaders, comme des bons princes machiavels, se sont livrés à amasser autant de pouvoir que possible, au détriment de leurs sujets. Au début de l’ère Chrétienne ce modèle du leadership n’était que le propre de la société séculière ce qui faisait que seulement les empereurs et les rois qui se rivalisaient afin de mesurer leur pouvoir.
Les leaders religieux, quant à eux, avaient une autre perception du leadership. Pour eux, ab initio, le modèle de leadership était celui du serviteur. Pour des leaders chrétiens, par exemple, le modèle du leadership était celui du berger ou pasteur dépeint comme le serviteur souffrant. Ce modèle de leadership était choisi non parce qu’ils aimaient la souffrance mais parce qu’ils savaient que pour leur maître, le pouvoir d’un leader ne vient pas de sa force mais plutôt de sa capacité d’être charismatique et visionnaire.
Ce modèle du leadership chrétien n’a malheureusement pas résisté au piège de l’époque médiévale, car les pasteurs se sont rapidement mis à imiter les princes et les empereurs ; ils ont adapté le style de vie des princes et des empereurs. Et ce modèle, une fois entré dans le fonctionnement des communautés et sociétés religieuses, a totalement changé le rôle et l’image des pasteurs. Ils se sont transformés de ceux qui servent à ceux qui se font servir. Ou de missionnaires en curés, pour utiliser une expression qui m’est chère. Et après avoir goûté au pouvoir inspiré non pas par le charisme et la vision, mais plutôt par la force, ils y sont restés pour plusieurs siècles. Et de génération en génération, ils ont continué à transférer ce savoir-faire jusqu’à ce que la société se soit finalement rendu compte de cette vulnérabilité masquée dernière la religion, et tout d’un coup, comme un tonnerre, les gens ont commencé à déserter les lieux dits religieux. Les leaders religieux, ainsi livrés à eux-mêmes et à la recherche d’un royaume perdu, étaient démasqués et ainsi a commencé la crise de leur autorité.
Et jusqu’à aujourd’hui, au lieu d’accepter cet « échec heureux », beaucoup continue toujours à rêver de retourner à un modèle qui n’a jamais été le leur. Ont-ils peur de redevenir humains ? La société les a-t-elle trop longtemps placés sur un faux piédestal et habillés sur un régal emprunté qu’ils ont oublié leur vraie nature ? Peut-être l’heure a-t-elle sonné pour que les pasteurs redeviennent humains. Peut-être que la société, surtout les jeunes générations ne veulent plus des « super-humains » comme leurs pasteurs. Ils veulent peut-être des personnes, aussi faibles qu’elles soient, pourvu qu’elles soient vraies, visionnaires et charismatiques. Ils veulent avoir cette possibilité de les regarder directement dans les yeux et de leur dire que leurs célébrations n’étaient pas à la hauteur ; ils veulent leur dire ce qu’ils apprécient dans leur manière de diriger la communauté ainsi que ce qui leur déplaît. Bref, le problème n’est peut-être pas celui de la jeune génération ; il n’est peut-être non plus celui des communautés chrétiennes. Aux pasteurs donc de chercher d’où vient la chute de l’autorité des pasteurs.
Ali C. Nnaemeka, omi (mekaalison@gmail.com) ”The truth might be hard to say, painful to bear or even drastic for the truth sayer but still needed to be said”. Alisonomi.