Une des questions que les gens me posent par rapport à ma présence dans un milieu autochtone c’est : « À quoi est-ce que tu t’attendais en venant chez les peuples autochtones ? » Évidemment, certains attendent que je dise que je pensais trouver des personnes avec des plumes sur la tête ou des lances en poursuite des bisons et des caribous. Ma première réaction est de rire parce que je sais bien ce que les gens pensent de mon Afrique. En réalité, j’en sais souvent plus que nécessaire pour avoir fréquenté beaucoup de milieux de vie et lu avec intérêt sur les questions de stéréotype et le danger du récit singulier.
Je réponds souvent, et en toute honnêteté que je ne m’attendais à rien. Je m’explique ! J’ai, bien sûr, entendu beaucoup de mythes sur les premiers peuples des Amériques et de l’Australie. J’ai, aussi, comme tout le monde, vu le film Les Cowboys et les Indiens et entendu beaucoup de récits sur Pocahontas. Mais, pour avoir appris toutes les fausses informations que les générations circulent sur l’Afrique, pour avoir su comment les gens prennent « les dieux sont tombés sur la tête » comme un prototype de la vie en Afrique, j’ai refusé de croire à ces mensonges sur les peuples autochtones.
J’explique donc à ceux qui me le demandent que j’aie choisi de ne pas croire à tous ces récits sur ces peuples afin d’en faire ma propre expérience. Et heureusement, mon intuition m’a donné raison. Car bientôt, cela fera quatre ans que je suis dans cette terre qui m’a adopté. Et depuis mon arrivée, je continue à apprendre à travers chaque événement qui se présente, la beauté, la richesse et la grandeur de la culture en cette terre sacrée de l’Amérique du Nord. De plus en plus, j’apprends à scruter l’interconnectivité entre tous les existants de notre cosmos. Et parce que j’aime l’anthropologie, la sagesse autochtone selon laquelle l’homme est le plus faible habitant de notre cosmos — dépendant sur tous les autres membres de notre cosmos pour son existence — m’a aidé à me défaire des idées selon laquelle l’homme est la mesure de toute chose. En plus, pendant que mon contact avec la spiritualité autochtone me donne l’occasion de redécouvrir la spiritualité de la tradition africaine et celle du christianisme, la langue innue m’a poussé à regarder l’aspect anthropologique de la linguistique.
Cependant, certains de ces curieux qui me demandent, avec souvent l’intention de savoir si j’ai des préjugés envers les peuples de la première nation, finissent par tomber dans leur propre piège. Rappelez-vous comment vous vous êtes sentis quand les étrangers, en débarquant dans vos communautés, vous demandent où sont les Indiens quand ils ne voient personne habiller en indien comme dans les films westerns qu’ils ont passé leurs jeunesses à regarder ? C’est ainsi que les Africains se sentent quand vous leur demandez — parce que vous avez regardé, « les dieux se sont tombés sur la tête » ou d’autres films — s’ils chassent des lions ou des zèbres dans leurs villages.
Vous vous rappelez combien vos sous étaient destinés à sauver des pauvres petits Africains et Chinois ? Combien croyez-vous en avoir sauvé ? Le stéréotype est un péché culturel qui rend les gens aveugles à des récits différents de ceux véhiculés par des groupes malintentionnés. Le stéréotype réduit le vécu d’un groupe à celui occulté par un autre même souvent initialement bien intentionné. Le stéréotype est aussi de généraliser les mauvais actes d’un individu ou quelques individus sur ses semblables.
À chaque fois, que vous voulez poser ce genre de questions à quelqu’un, demandez-vous comment vous sentiriez-vous si la question vous était adressée ? À tout moment que vous voulez juger l’autre ou le mettre sur un cliché, demandez-vous d’abord comment vous vous sentiriez si le péché d’une personne ou quelques personnes définissait votre identité. Je suis Africain, noir, prêtre missionnaire et humain et je partage l’histoire de mes ancêtres ; je participe au récit de tous ceux qui m’ont précédé et je suis héritier de tous ceux qui ont marché sur cette terre humaine avant moi, mais, je ne suis ni défini par leurs péchés ni déterminé par leur succès. Je déteste et dénonce leurs mauvais coups et j’assume mon existence personnelle tout en portant ma part d’eau au moulin commun qui nous est légué par le créateur. Bref, je suis prêtre, noir, humain, mais je suis d’abord un individu en quête de sens et participant à l’embellissement de la terre humaine.
Ali Nnaemeka, O.M.I