C’était une bonne occasion d’écouter des témoignages sur la mission en périphérie. On a constaté que la mission en Amérique aujourd’hui devient de plus en plus compliquée qu’avant. Les questions historiques du Canada et la situation sociologique des Antilles sont des exemples pertinents.
La Mission ambigüe de l’Église canadienne
L’idée que l’Église du Canada ait montré de la générosité envers d’autres églises du monde est un fait. Pour plus d’un siècle, elle a dû envoyer les missionnaires partout dans le monde. Aujourd’hui, elle s’est appauvrie, perdant son statut d’église qui envoie les missionnaires à une qui reçoit.
Elle est également victime de son propre succès, car ayant beaucoup de prêtres, elle a oublié d’intégrer les laïques dans son histoire.
Ensuite, la question de la mission dans un Québec post-révolution tranquille ou encore dans un Canada post-commission Vérité et Réconciliation demande une redéfinition de la mission. Comment exprimer la bonne nouvelle si les évangélisateurs ne sont plus crédibles ? Comment faire valoir l’amour de Dieu à un peuple qui se sent blessé au nom du même Dieu ?
Le P. Nnaemeka Ali, originaire du Nigeria, nous a fait part de son expérience missionnaire chez les Innus. Selon lui, la mission qu’il a reçue lui a permis de changer le regard sur la façon d’être missionnaire. Au départ, cette transformation a été bouleversante, mais a fini par révolutionner sa relation avec Dieu et les autres. Bref, selon le père, chaque nouvelle mission demande un nouveau regard et l’obligation de laisser une chaise vide pour l’Esprit Saint.
Le passé civilisateur de la Mission de l’Église Antillaise
Le témoignage de l’expérience missionnaire canadienne de la mission a été suivi par l’expérience antillaise de la mission. Nous avons écouté une lecture d’un excellent texte de Mgr Gérard COUNTY, C.S.Sp, évêque de Kingstown, Saint-Vincent-et-les-Grenadines. Dans son message, il a abordé la question de la relation entre l’Église Catholique et les communautés afro-antillaises et Autochtones. Son témoignage est intitulé “GOD’S WORK OF ART (Eph. 2:10) — Tracing the finger of God’s hand in the tapestry of the Caribbean Mission.” C’est à travers son texte que Mgr County nous a permis de parcourir l’histoire des peuples antillais, surtout en relation avec le rôle de l’Église dans les circonstances qui continuent d’affecter leurs sociétés. En effet, Mgr County nous explique que l’Église a été historiquement impliquée dans la traite des esclaves et la déshumanisation des autochtones.
Parlant du rôle joué par le christianisme dans la traite esclavagiste, Mgr County nous dit :
« Very regrettably, Christian Churches and missionaries, by their complicity and accommodating ‘theologies,’ ‘blessed’ and endorsed the underlying (dehumanizing) anthropology of the system, thus giving (‘divine’) legitimacy to the whole enterprise. »
C’était une histoire très triste. Pourtant, il y avait également, dans l’église, plusieurs membres de l’Église, comme P. Antonio de Montesinos, qui ont dénoncé ses compatriotes européens pour leur implication sur la situation de la population autochtone, par exemple. Il y avait d’autres évêques, comme l’archevêque Anthony Pantin, qui se sont ralliés à côté des populations noires lorsqu’ils se sont soulevés contre l’injustice que vit leur peuple.
En résumé, le texte du Mgr County qui nous a été présenté par le P. Esteban Kross est un témoignage d’un chemin tortueux des peuples antillais et du rôle ambigu dans le passé, mais récemment plus encourageant de l’Église dans leur chemin de réinvention.
La Vocation théologique de la Mission d’Aujourd’hui
Deux présentations théologiques ont eu lieu au cours de la deuxième journée : d’abord pour introduire les témoignages de la journée et ensuite pour les relier. La première était intitulée « L’Esprit Saint et l’Ouverture Missionnaire de l’Église Primitive dans les Actes des Apôtres ». Cette réflexion biblique sur la mission nous a permis de constater que si le christianisme a réussi à partir d’une secte juive à une religion mondiale, c’est surtout parce que les premiers chrétiens, en plus de la qualité de leurs vies, ont également fait la place à l’Esprit Saint. Le P. William nous a donc invités à reprendre connaissance de l’attitude de l’Église primitive qui était de s’assurer que, dans chacun de leurs plans missionnaires, il y avait la place réservée à l’Esprit Saint.
Après avoir relié les témoignages du jour et nous avoir préparé pour le travail en carrefour, nous avons aussi écouté Mgr Tomas G. Gonzalez Gonzalez nous parler “Des pasteurs-évangélisateurs avec l’Esprit au service des nouveaux confins de l’Église universelle”. C’était vraiment un moment de revoir comment l’Église d’Amérique s’implique dans les missions périphériques. Bref, sa réflexion était axée sur l’attention à des signes de l’Esprit dans les milieux les moins fréquentés de l’Église.