Une fois le chant d’entrée a été entonné, le cortège nuptial procéda à l’autel avec une élégance magique. C’était un autel fait sur un long canoë vert qui pour des décennies a pu faire presque tous les lacs de Matimekush-Lac John. Un canoë qui a déjà une longue histoire, mais qui aujourd’hui, grâce à ce mariage du siècle, rajouté une plume de plus sur ces trophées abondants.
Positionné solennellement derrière ce magnifique autel improvisé, le prêtre attendait le couple avec son éternel sourire au coin des lèvres. Se balançant légèrement, il chantait avec l’une des meilleures chanteuses de notre communauté, une aire de Noël. Et, la communauté, éprise par la beauté et la grâce du cortège nuptial, avait brièvement oublié qu’il refaisait -21 °C.
Tous — petits et grands — avec leurs téléphones cellulaires, n’avaient qu’un seul objectif — immortaliser cette journée de grâce. Les iPhones, ces téléphones chéris de gens de notre génération, se rivalisaient avec d’autres cellulaires dont nous n’oserons pas nommer pour le simple plaisir de vous laisser la curiosité de les deviner. Pour comprendre la place de la technologie moderne dans nos rites et fêtes, il faudra peut-être assister au mariage dans une communauté éloignée et avec beaucoup de population jeune. La vue était cinématographique avec les voitures étaient garées à une file impressionnante. Les pickups se moquant d’autres voitures qui osent se pointer dans cette ville de skidoo et de pickup.
Quand le couple est arrivé au lieu prévu de la cérémonie, le prêtre commença en faisant une introduction à la célébration qui allait se dérouler. Il rappela que même si le couple vivait déjà ensemble depuis plusieurs années, cette journée marque officiellement leur décision de fonder une famille. Il rappela qu’ils sont tous invités à être les témoins de la sollennisation de leur amour. Après sa brève introduction et la prière d’ouverture, la première lecture a été lue par la nièce de la mariée. Habillée vraiment pour les circonstances, elle entra gracieusement avec son allure fringante, et prononça la parole de Dieu avec une éloquence sublime.
À partir du livre de Genèse, toute la communauté a été solennellement invitée à contempler la beauté singulière et la sacralité du mariage. À l’homélie, le prêtre debout, avec une voix presque tremblante, ayant osé braver le froid de cette ville enclavée et hivernale, demanda à la communauté de porter le jeune couple dans leurs prières. Il leur a aussi rappelé que le sacrement est un acte divin, et que celui qui s’attaque à cette union sacrée s’attaque à celui qui est le vrai auteur du mariage religieux.
Et sans trop tarder, de peur que le vent ne se rappelle son absence, et décide de revenir en vigueur et armé jusqu’aux dents avec ses acolytes — les poudrières et le blizzard — il passa au rite du mariage, proprement dit.
Devant la tente où la cérémonie avait lieu se trouvaient deux poêles à bois bien alimentés avec des bois de notre forêt nordique. Calmement, ils dégageaient une chaleur bienfaisante, comme si elles comprenaient bien le besoin ardent des participants pour la chaleur. À l’intérieur de la tente a été aussi installée une grande chaufferette électrique.
Ensuite, devant toute la communauté, se mettant debout, le couple sans peur du froid qui continuait à défier la chaufferette électrique ainsi que les poêles à bois a commencée par enlever leurs gants. Se tournant l’un envers l’autre, ils attirèrent des centaines d’yeux sur eux. Les téléphones intelligents se sont encore frileusement ressortis du confort des poches où ils voulaient se réfugier contre le climat inhabituel de cette région nordique.
Sur les regards admirables de gars et des filles d’honneur, on pouvait lire leur joie d’assister à cet événement fondateur, mais également leur question silencieuse, à savoir quand prendra fin cette cérémonie. S’ils n’étaient pas tous nés ici, on se serait demandés s’ils regrettaient d’avoir accepté de faire partie de cette belle cérémonie qui même en regardant le couple. Il semble se demander s’ils savaient qu’il allait faire si froid. Pourtant, sans hésiter, ce couple se met à échanger leurs vœux dont :
« Bob,
Moi, Bob, je te reçois Angèle, comme épouse,
et je promets de te rester fidèle,
dans le bonheur et dans les épreuves,
dans la santé et dans la maladie,
pour t’aimer tous les jours de ma vie.
Angèle,
Moi, Angèle, je te reçois Bob, comme époux,
et je promets de te rester fidèle,
dans le bonheur et dans les épreuves,
dans la santé et dans la maladie,
pour t’aimer tous les jours de ma vie. »
Une fois, l’échange des vœux et toutes autres prières du mariage sont faits, le prêtre termina la célébration. Et, sur le champ après, toute la communauté se sont rassemblés pour souligner cet événement transformateur à se mettant à danser le Makushan.